QUELQUES SOUVENIRS
Je vous parle parfois de mes compagnons étrangers rencontrés sur les chantiers. Je vais dans les deux prochains billets, vous les présenter rapidement car j’ai retrouvé quelques rares photos. Avant il faut que je vous parle un tout petit peu de ma vie d’avant pour comprendre ce qui a amené ces rencontres. Je vais essayer de faire bref.
En 1994, j’ai 45 ans et me retrouve, après reprise par un groupe de ma petite entreprise de tôlerie, largué sans parachute par la « world company ». Ma situation financière est alors très précaire et ne me permet pas de rester sans emploi. Aller pointer à l’ANPE et grossir les dossiers poubelles des cadres en quête de job serait aussi utile que de s’asseoir sur un caillou et attendre en pleurant des jours meilleurs.
Heureusement dans ma jeunesse j’ai fait dix ans sur les chantiers de fondations spéciales où j’ai acquit une certaine expérience en forage et traitement de sol. J’avais quitté en bons termes cette entreprise et y avait gardé quelques contacts amicaux, j’appelle. C’est un corps de métier où les ouvriers manquent :
Travaux pénibles,
image du net (Il me semble reconnaitre une tranchée RER C où j'ai bossé)
Physiques
image du net (même job que le mien)
Salissants
Parfois en "milieu hostile" : Galeries insalubres, bruit insuportable pour un novice, chute d'eau et de boue, projections de ciment, etc...
En plus il faut le dire : Tout cela en déplacement avec un pouvoir d’achat fortement réduit par rapport aux années 70 restant tout de même plus attractif que certains emplois locaux. Mais surtout un milieu ou règne une solidarité et une ambiance exceptionnelle.
Seulement le hic lorsque je me présente, comme de partout c’est la période des fusions, absorptions et reprises d’entreprises avec les fameux « plans sociaux » (j’appelle ça rejet des kleenex usagés) et les interdictions d’embauche qui les suivent. S’il est impossible en 94 de m’embaucher sans déclencher les foudres de l’inspection du travail il est tout à fait possible de m’employer en intérim, ce qui me fait parfois douter du bien fondé de notre action sociale mais c’est un autre sujet. Enfin voilà je reprends mon baluchon, j’enchaîne pas très loin de chez moi des petits chantiers de montagnes pour l’agence de Lyon qui me vont comme un gant et me voici au dessus des deux Alpes à 2500m d’altitude à sonder et forer pour un lac artificiel, la vie redevient un fleuve tranquille jusqu’à ce jour de juillet où…La D.R.H. me contacte : Je suis le meilleur, le plus beau, le plus fort. L’entreprise a besoin d’un gars comme moi sur un chantier en Martinique. Je ne suis pas dupe, s’ils m’y envoient c’est que toutes les personnes « embauchées » susceptibles de s’y rendre ont refusé, c’est probablement une grosse galère mais c’est aussi l’occasion de négocier une embauche. Huit jours après je suis à Ruel Malmaison, signe mon CDD avec une promesse de CDI, passe à la vaccination et embarque à Orly. C’est à Fort de France que je vais rencontrer mes « companeros » vénézuéliens. Je vous les présente au prochain billet.
HASTA LUEGO